Personal tools
You are here: Home | Recherche | Géomatique | Veille pédagogique et technique | Sites de géomatique | Lettre d'information | Articles | lettre n°8 | Tianditu, le nouveau géoportail chinois : entre le ciel et la terre
Document Actions

Tianditu, le nouveau géoportail chinois : entre le ciel et la terre

by Jérôme Staub last modified 2010-11-14 11:42

Retour à la lettre d'information n°8

Tianditu_page_acceuil

Le 21 octobre 2010, la République Populaire de Chine avec son « State Bureau of Surveying and Mapping » a lancé officiellement son géoportail, comme la plupart des autres grands pays le font progressivement avec leurs propres sensibilités culturelles et politiques.
On aurait pu croire que seul le territoire de la République Populaire de Chine serait disponible, comme la France a pu le faire avec son propre territoire dans le géoportail.fr, en omettant le reste du monde. C'était sans compter sur la volonté chinoise de vouloir s'impliquer plus largement dans le monde des cartes virtuelles.
Baptisé « tianditu » en chinois, et « WorldMap » pour l'international, le géoportail est accessible via deux URL : http://www.tianditu.cn et http://www.chinaonmap.cn . Les serveurs sont hébergés bien sûr en Chine, une condition rendue obligatoire depuis l'été 2010 par le gouvernement chinois. En effet, les sites web mettant à disposition des éléments de cartographie doivent dorénavant obtenir un agrément et être physiquement sur des serveurs implantés sur le territoire chinois. Quelques grands fournisseurs de données géographiques et de téléphonie mobile ont effectué cette demande d'agrément .  Selon diverses sources, Google n'aurait pas fait la demande pour son Google Maps (Ditu en Chine). Cette restriction fait que les serveurs SIG hébergés en dehors du territoire chinois sont soumis au bon vouloir du GWF (Great Wall Firewall) filtrant les accès aux sites web internationaux... d'où l'intérêt de « Tianditu » !

 

Page d'accueil de Tianditu

 

 

 

Un géoportail uniquement pour les Chinois ?

On ne pouvait pas passer à côté de tianditu lorsqu'on s'imagine le nombre de chinois connectés à internet et désirant voir leur région... comme nous avons pu le faire avec le géoportail français dès sa sortie. Effectivement, il faut être chinois pour le consulter ! Il n'existe qu'en langue chinoise et en chinois simplifié (ce qui complique un peu la tâche des habitants de HongKong et de Taiwan). Donc, exit le reste de la planète : aucune information concernant des versions en langue anglaise par exemple n'a filtré. Mais en un peu moins de trois semaines ,ce sont près de 5 millions de connexions sur Tianditu qui ne possède encore que quelques dizaines de serveurs (à comparer aux centaines de Google Maps / Earth).
Toutefois, une certaine convivialité et une expériences des géoportails, nous permet de naviguer globalement dans Tianditu sans trop de difficultés apparentes... dans un premier temps. Ça se complique dès que l'on s'aperçoit que les noms de lieux sont en caractères chinois et non accompagnés de leur écriture en pinyin (sorte d'écriture phonétique mis en place par la RPC)... sans compter les menus et explications !

Y a quoi dans Tianditu ?

Comme tout géoportail national qui se respecte, dès la connexion nous nous retrouvons au-dessus de la Chine, avec un choix en mode carte vectorielle par défaut, ou en mode image satellite, ou encore en mode 3D.

Mode vectoriel

tianditu_vue_vec

 

 

Les cartes disposent des différentes limites administratives, des réseaux routiers et ferroviaires, ainsi que des éléments d'informations habituels que l'on retrouve dans Google Maps : bâtiments administratifs, banques, commerces, etc. Ne vous attendez pas à trouver des détails type IGN au 1/25 000... cela reste du domaine « secret défense ». Par exemple, en zone rurale, la plupart des bourgs sont indiqués, et parfois même quelques villages, mais sans le réseau routier qui les relie... ce qui n'est guère différent des cartes routières papier disponibles en Chine.

 

 

 Vue vectorielle de Guilin dans le Guangxi

 

 


Mode image satellite

tianditu_vue_sat

 

 

 

 

Dans ce mode on peut désactiver ou non la superposition des informations de la couche vectorielle. La résolution est très décevante pour les zones hors de la Chine : on se contentera d'une résolution de 500 mètres ! Par contre sur le territoire chinois, la résolution peut varier de 2,5 mètres (en zone rurale surtout) à 60 centimètres (dans la plupart des grandes villes) et là nous sommes dans un rapport quasiment identique à ce que l'on peut trouver sur Google Maps. On ne s'étonnera pas que la frontière sino-nord coréenne soit d'une résolution assez basse ainsi que pour certaines zones de Taiwan.

 

 Vue satellite de Guilin



3 Dimensions

Le passage à la 3D nécessite l'installation d'un plugin (Geoglobe_runtime) uniquement disponible sous Windows et pour le navigateur Internet Explorer. Bien que sur internet nous ayons trouvé des copies d'écran de la 3D dans Tianditu, il nous a été impossible de reproduire cette fonction : IE (7,8 et 9) plante... Ceux qui ont réussi à l'installer, indiquent que la qualité de représentation du relief est inférieure à celle obtenue avec le plugin Google Earth (ou GE).

Les outils de navigation

Pour naviguer, on dispose d'outils classiques à peu près identiques à ceux de Google Maps : curseurs, flèches, etc. Avec des échelles allant de « continent » à « rue » ; ainsi que des outils disponibles via les menus horizontaux.
La culture « internet » chez les Chinois est assez différente de la nôtre. Ce qui explique un design généralement beaucoup moins... « design » que les sites web occidentaux. Les Chinois ont tendance à privilégier l'écrit aux illustrations dans leurs sites. Cet aspect se retrouve donc dans Tianditu et peut nous dérouter par son manque de « lecture intuitive » dès que l'on veut utiliser des fonctions plus complexes.
Un moteur de recherche permet de se diriger vers un lieu défini ou une zone définie avec affichages des POI, il est possible de rentrer les données en caractères chinois mais également en pinyin (par exemple Beijing, Shanghai, etc.). Les données peuvent être aussi  des nom de lieux que des recherches comme « gare routière de Kaili », « distributeur de billet rue de la Longue Marche à Guangdong ». Il existe dans le menu horizontal supérieur un système d'accès direct aux différentes provinces et à leurs  villes principales.

Les outils d'édition

tianditu_edition

 

Trois outils d'édition sont fonctionnels :
1) un éditeur de bulle d'information pour des repères de lieux, de segments, d'aires du même genre que ceux de l'éditeur « mes cartes » dans Google Maps avec comme limitation l'impossibilité de sauvegarder (mais grâce aux cookies, les infobulles semblent se maintenir dans la zone de l'éditeur). Possibilité de choisir ces icônes de repères.
2) Calcul de distance : par tracé de segments successifs ; attention toutefois aux unités utilisées ! (un lexique chinois est nécessaire... car l'unité change en fonction de l'échelle et de la distance mesurée)
3) Calcul d'aire en définissant une zone à la souris. Remarque identique à ci-dessous en ce qui concerne l'unité de surface.
On peut imprimer les cartes avec éventuellement les données d'édition que vous auriez pu concevoir... et les sauver en utilisant « l'impression dans un fichier ».
Une fonction d'itinéraire semble être présente... mais pas d'explications sur son utilisation dans la FAQ de Tianditu.

 

 Centre ville de Guilin avec l'éditeur d'infobulle



L'origine des données


tianditu_ete_tianditu

 

 

 

Dès l'ouverture de Tianditu, un début de polémique est apparu, concernant l'origine des données géographiques, suivie d'une autre  au sujet  des limites frontalières (voir ci-dessous)  Si la partie vectorielle semble bien d'origine chinoise, il n'en est pas de même pour les images satellites. Tianditu indique pourtant que ces dernières ont été prises entre 2006 et 2010 et proviennent essentiellement de satellites américains : les données ont été achetées à des entreprises étrangères (surtout DigitalGlobe) ; d'où leur similitude avec les données satellites de Google.

 

Un bout du palais d'été à Beijing vu dans Tianditu

 

 

tianditu_gmapsUn bout du palais d'été à Beijing vu dans Google Maps

Les polémiques sur les frontières

Tianditu n'est pas à l'abri des revendications territoriales de ses voisins. En tant que géoportail national, il était donc tout à fait logique que les conflits apparaissent ; Google (tout en étant une entreprise privée) fait aussi régulièrement l'objet de ce type de revendication (la dernière en date étant sur un problème de limite entre le Costa Rica et le Nicaragua).
Le premier pays à s'insurger officiellement sur les limites frontalières de Tianditu est le Vietnam, par l'intermédiaire de son Ministre des Affaires Étrangères. Le litige concerne les archipels Hoang Sa et Truong Sa, ainsi que la distance des eaux internationales (non respect de la convention des Nations Unies sur les  droits de la mer).
L'Inde n'est pas en reste, en particulier avec sa frontière avec la Chine, mais également avec le Pakistan (pour le Cachemire, par ex.), le Ladakh, etc. L'Inde est en train de déployer son propre géoportail,  Bhuvan »... donc affaire à suivre !
Bien sûr Taiwan est comme d'habitude considéré comme une province de la RPC.

Les API de Tianditu

Tianditu met à la disposition du public (enfin ceux comprenant le chinois) deux API permettant de personnaliser et d'intégrer le géoportail sur vos sites web. Une API pour la 2D et une deuxième pour la 3D. La programmation de ces API se fait de manière quasiment identique aux API de Google Maps. Des exemples et des guides des API sont disponibles sur Tianditu. A noter qu'il n'est pas nécessaire d'obtenir une « clé » comme chez Google pour faire fonctionner l'API.

Autres informations de Tianditu

D'autres accès sur le site permettent de consulter les nouveautés de Tianditu, les différentes sources de données, des liens vers les sites officiels des Provinces chinoises, une Foire aux Questions, des formulaires en ligne pour faire des commentaires, etc.
Pour utiliser Tianditu dans ses principales fonctions (vectorielles, satellites, 2D), les systèmes d'exploitation Linux, MacOS et Windows offrent une compatibilité générale avec Firefox. Pour avoir d'autres fonctionnalités (3D, certains survols d'icônes), Windows et Internet Explorer sont nécessaires. La lenteur constatée de Tianditu est liée aux serveurs et non à la configuration de vos machines.

Conclusion

Pressés de comparer Tianditu avec Google Maps, il faut relativiser, le géoportail chinois n'a que 3 semaines d'existence, dans une phase Bêta et devrait selon ses créateurs s'étoffer au fur et à mesure. Actuellement nous n'atteignons pas les fonctionnalités de GM, mais on peut supposer d'une évolution rapide. La langue chinoise est le facteur limitant, et l'usage des traducteurs automatiques en ligne n'est pas satisfaisant en raison de la structure grammaticale particulière du chinois, pour obtenir des éléments de réponses corrects.
A l'heure où les géoportails nationaux émergent, on ne peut que se féliciter de cet essor, où chacun avec sa culture, son histoire, présente sa vision du monde. Tianditu en est un exemple particulier, d'une part par sa langue, son nombre d'habitants et son régime politique. Son étude comparative et raisonnée avec d'autres géoportails devrait faire partie intégrante des enseignements de la géographie.
On supposera que le nombre croissant de serveurs Tianditu offrira une plus grande rapidité d'accès et d'affichage des données et que les fonctions 3D ne comporteront plus d'erreur d'installation et d'usage.

 

Pour aller plus loin avec Tianditu....

Le site Fausse-Piste propose plusieurs articles explorant ce service :

 

 

Auteur : Pascal Buch, professeur des écoles, école de Saint André d'Embrun (05)... dans une classe de 28 élèves de CE2 CM1 CM2.


notice légale