Des voyages virtuels en Histoire-GĂ©ographie avec Google Earth : pourquoi ? comment ? (avril 2011)
Retour à la Lettre d'information géomatique n°11
A fur et Ă mesure des mises Ă jour successives - aujourdâhui la version 6.0 - Google Earth devient grĂące Ă son systĂšme dâaffichage de repĂšres et de couches, grĂące Ă la possibilitĂ© dâĂ©crire sur le support et Ă sa modĂ©lisation 3D, un excellent point dâentrĂ©e dans de nombreux sujets des programmes de collĂšge et de lycĂ©e et pour de nombreuses disciplines scolaires.
Depuis 2007, le site voyages-virtuels.eu propose des parcours pédagogiques avec Google Earth pour élÚves et enseignants de collÚge et de lycée.
Une quarantaine d'exercices ont été conçus avec ce géonavigateur gratuit, en Géographie, puis en Histoire et plus récemment pour l'Histoire des Arts.
En quoi ces parcours peuvent-ils favoriser une mise en activitĂ© des Ă©lĂšves ? Comment les crĂ©er ? Quels sont les apports didactiques de l'outil ? Pourquoi utiliser cette plateforme logicielle pour des cours dâhistoire ?
La genĂšse de ces voyages virtuels
Les premiers parcours ont été conçus pour le LOG (Lycée Ouvert de Grenoble) qui repose sur un dispositif d'enseignement à distance.
Il s'agissait de mettre à disposition des élÚves (sportifs de haut niveau, convalescents de longue durée) des ressources numériques pour un enseignement en non-présentiel.
Cela impliquait que la mise en place dâune activitĂ© avec GE - comme d'ailleurs avec d'autres outils TICE - soit prĂ©parĂ©e et balisĂ©e par une fiche de travail aux consignes prĂ©cises, qui oriente les Ă©lĂšves et diminue le recours aux questions au prof⊠puisqu'il n'Ă©tait pas lĂ !
Cela s'apparentait donc à un tutorat à distance avec une introduction qui présente le sujet et les consignes, puis une série d'étapes de difficulté volontairement inégale pour que chacun puisse avancer à son rythme, pour terminer sur une synthÚse (questions ou paragraphe argumenté ou croquis), ce qui permet de mettre les élÚves en autonomie guidée sur un logiciel « ludique » à la prise en main intuitive.
Par la suite, j'ai souhaité sortir du cadre à l'accÚs restreint de l'Espace Numérique de Travail et proposer ces ressources d'abord à mes élÚves, puis aux collÚgues qui n'ont pas le temps ou les connaissances techniques pour réaliser de tels parcours pédagogiques.
J'ai donc créé mon propre site et regroupé ces travaux jusque-là dispersés, afin de leur donner une plus grande visibilité et de les offrir au plus grand nombre.
J'ai donc crĂ©Ă© mon propre site et regroupĂ© ces travaux jusque-lĂ dispersĂ©s, afin de leur donner une plus grande visibilitĂ© et de les mettre Ă disposition de tous. De ce point de vue, entre 3 et 4000 tĂ©lĂ©chargements par mois de ces fichiers .kmz (format des fichiers crĂ©Ă©s avec Google Earth) montrent que lâobjectif est atteint.
Quelles sont les Ă©tapes de la construction dâun voyage virtuel ?
1. Définition du thÚme : quel sujet ? quelle échelle ? quelle problématique ?
Les sujets ont été choisis :
- Au début, en fonction des programmes de lycée comme les premiers parcours sur San Francisco, Le voyage d'un porte-conteneurs, La puissance américaine, mais aussi en fonction des ressources disponibles dans GE, patchwork d'images disparates qui surreprésente les espaces urbains (et américains).
- Puis à la demande des IPR de Grenoble, en fonction des nouveaux programmes de collÚge applicables à partir de 2009 et qui mettent l'accent sur une utilisation plus intensive des TICE, j'ai élaboré quelques parcours pour la classe de 6Úme : Phoenix, Sahara, paysage de faible occupation humaine, Egypte, puis de 5Úme en Histoire (Jakob Fugger, Ibn Battuta). Ce qui permet, par ailleurs, de valider certains items du B2I.
- Parfois en fonction de lâactualitĂ© (exemple le parcours sur l'investiture d'Obama, sur le 40° anniversaire de mai 68, sur la crise alimentaire mondiale de 2008, sur la candidature d'Annecy aux Jeux Olympiques d'hiver 2018).
- En fonction de besoins manifestés par les collÚgues : une initiation ludique de niveau sixiÚme avec un jeu de piste (le trésor du pirate) ou récemment Les destructions sur le littoral japonais du Tohoku.
A partir de ces choix, j'essaye de proposer des parcours sur des sujets à différentes échelles :
- locale : une résidence fermée sur la CÎte d'Azur, la périurbanisation autour de Montpellier, les contrastes urbains à Rio, les métropoles américaines, Benidorm et le tourisme de masse.
- régionale : les espaces littoraux asiatiques, la marée noire du golfe du Mexique
- nationale : la puissance américaine
- mondiale : le voyage d'un porte-conteneurs, la crise alimentaire mondiale de 2008
2. Récolte des données sur Internet
La partie la plus longue et chronophage du travail est la recherche documentaire. Il faut, dans la mesure du possible, disposer de donnĂ©es fiables et incontestables : sites Internet institutionnels de lâONU (UNDP, FAOâŠ), des Etats (INSEE, INED, AssemblĂ©e NationaleâŠ), ou reconnus par la communautĂ© enseignante (Histoire par lâimage, cartes Rumsey, journaux et magazines de rĂ©fĂ©rence...), quelques articles complĂ©mentaires de WikipĂ©dia ou tirĂ©s de sites personnels - mais validĂ©s par le professeur-concepteur - quand il nâa pas Ă©tĂ© possible de proposer des sites institutionnels. Pour les photographies, une collection personnelle importante et Clio-Photo, site mutualisĂ© de photos libres de droit pour usage pĂ©dagogique permettent de traiter de nombreux thĂšmes des programmes scolaires.
Une veille technique est aussi nécessaire, certains sites, fichiers ou liens n'étant pas pérennes ! Par exemple le porte-conteneurs Chine-Europe a été ramené au bassin de radoub pour déjà 5 "contrÎles techniques" et modifications de liens obsolÚtes ! La mise à jour est plus aisée quand on a la main sur son propre site que sur un site académique.
3. Mise en place du scénario pédagogique
Un exemple de scĂ©nario en GĂ©ographie : lâitinĂ©raire dâun navire porte-conteneurs depuis ShanghaĂŻ jusquâĂ Rotterdam. Les acteurs (Ă©quipage, armateurs, FTN), les hubs, les dĂ©troits stratĂ©giques, les infrastructures portuaires, les chargements/dĂ©chargements de produits, les zones franches, les ZIP sont interrogĂ©s et visualisĂ©s et permettent dâintroduire au concept de mondialisation.
Un autre exemple de scénario, en Histoire : un comptable stagiaire embauché par Jakob Fugger doit connaßtre le fonctionnement de l'entreprise. Pour cela, il part en mission dans chacune des succursales et rédige un rapport de visite. L'occasion de découvrir le rÎle, les activités, la puissance de celui qui fut surnommé "le prince des marchands".
La scénarisation et le questionnement permettent aux élÚves une mise
en activité, un travail autonome et une appropriation des savoirs et des
méthodes. Cela permet aussi de lutter contre la tentation de certains
de nâen rester quâĂ une forme de contemplation - parfois de sidĂ©ration -
devant ces images. Elle contribue au maintien de lâattention jusquâĂ la
fin de lâexercice.
Les cartes Rumsey pour Ă©tudier la traite transatlantique
A travers diverses Ă©tapes lâĂ©lĂšve trace son itinĂ©raire sur des documents et des sites rĂ©pertoriĂ©s et validĂ©s par le professeur.
Le travail est organisé en dossiers et sous-dossiers qui correspondent à des paragraphes.
Il est aussi possible de présenter les items dans le désordre et de
demander aux Ă©lĂšves de retrouver un ordre logique, Ă©laborant ainsi un
plan qui permette de classer ces différentes étapes.
Voir par exemple la version 2 de la puissance américaine sur le site académique de Grenoble :
http://www.ac-grenoble.fr/disciplines/hg/articles.php?lng=fr&pg=435
ou la version 2 de l'introduction au programme de GĂ©ographie de Seconde qui, volontairement, n'indique pas les thĂšmes, qui sont Ă retrouver par les Ă©lĂšves :
Chaque parcours est accompagné d'une fiche de travail qui restera la trace papier, une fois l'ordinateur éteint.
L'essentiel est de construire des usages qui favorisent l'apprentissage critique de l'image et de la carte et pour cela, multiplier les exercices qui décryptent ces mosaïques composites.
Identifier, dĂ©crire, expliquer restent quel que soit l'outil, les bases de lâenseignement gĂ©ographique.
En Histoire, l'un des intĂ©rĂȘts d'utiliser GE avec un scĂ©nario permet d'ancrer le rĂ©cit historique dans une rĂ©alitĂ© gĂ©ographique, de donner Ă voir un Ă©vĂ©nement dans son contexte gĂ©olocalisĂ©.
Une démarche hypothético-déductive sur Bénidorm
4. La construction de voyages virtuels
Dans les consignes liminaires, demander aux Ă©lĂšves de dĂ©cocher la quasi totalitĂ© des options dans «DonnĂ©es gĂ©ographiques» qui parasitent le travail Ă faire en classe ; ne garder selon les besoins que « Relief » et Ă©ventuellement « LĂ©gendes». Nâutiliser que si nĂ©cessaire Ă la comprĂ©hension, les options « BĂątiments 3D » et Street View qui rĂ©duisent la vitesse de connexion, surtout sur un rĂ©seau d'Ă©tablissement !
Aérer la mise en page : par des images, des espaces qui évitent de trop longs textes, fastidieux à lire à l'écran, surtout pour les collégiens.
Une mise en page aérée sur Gibraltar
Des choix graphiques pour une meilleure lisibilité.
Privilégier la lisibilité : des polices, des couleurs, des icÎnes variées de façon à différencier ce qui est texte, complément d'information, questionnement.
Faire preuve de rigueur dans le choix du cadrage (vertical, oblique), de l'altitude, dans le placement, au plus prÚs, des repÚres et pour cela ne pas hésiter à rechercher l'adresse précise de tel bùtiment sur Internet ou dans GE.
Des choix graphiques pour une meilleure lisibilité.
Prévoir une mise en activité des élÚves : calculer la longueur d'une
rue, la taille d'une exploitation, faire apparaßtre le réseau routier,
vérifier des altitudes, utiliser le curseur de transparence pour faire
apparaßtre un calque d'interprétation, faire correspondre une photo de
paysage à un repÚre numéroté... les possibilités sont multiples. Faire preuve de rigueur dans le choix du cadrage (vertical, oblique), de l'altitude, dans le placement, au plus prÚs, des repÚres et pour cela ne pas hésiter à rechercher l'adresse précise de tel bùtiment sur Internet ou dans GE.
Passer de la photo au croquis paysager (vallée du Todra, Maroc)
Ăventuellement donner un titre "neutre" (ActivitĂ© 1 ou RepĂšre 2) pour laisser Ă l'Ă©lĂšve le soin de l'observation et de la description.
Découverte des activités du port de Rotterdam
Réaliser au final une synthÚse, texte et/ou croquis et/ou modéliser
une structure. En somme, utiliser tous les atouts de GE en faisant
manipuler cette interface ludique et attrayante (boussole, orientation,
3D, zoomâŠ)
Quelques apports didactiques de lâutilisation de Google Earth en classe de gĂ©ographie
LâemboĂźtement dâĂ©chelles dâun coup de zoom trĂšs fluide est un des points forts de GE, largement utilisĂ© dans les journaux tĂ©lĂ©visĂ©s.
La base américaine de Diego Garcia au milieu de l'océan indien en 2 repÚres et 2 clics
Faire apparaßtre, simplement en cochant une case, des bùtiments modélisés en 3 D mÚnera rapidement l'élÚve à une compréhension de la notion de CBD. Les autres composantes de la ville sont également visualisées, interrogées (réseau urbain, universités, banlieues...) et permettent d'aboutir à une définition du concept de métropole.
Autre exemple, grĂące Ă la possibilitĂ© de calculer les distances, de circuler et de naviguer sur cette "carte Ă©lectronique", lâimbrication des favelas dans le tissu urbain Ă Rio prend sens bien mieux que sur un croquis ou sur une image fixe.
Le CBD de Phoenix, Arizona
Lâajout progressif dâinformations en cochant/dĂ©cochant des cases, en jouant sur les superpositions de couches, celles de GE : voies de communication par exemple, ou celles construites par le professeur (voir lâexemple de Phoenix ci-dessous ou de la crue du Nil : http://www.voyages-virtuels.eu/voyages/college/index.html). Cette construction progressive d'un modĂšle - identique Ă l'ajout de transparents avec le rĂ©troprojecteur - est un vrai support pour l'apprentissage de l'analyse spatiale.
La construction progressive du modÚle de la ville américaine avec sa légende
Des parcours adaptables au niveau de la classe ou de l'élÚve, en décochant ou en supprimant certains repÚres sans altérer le document construit. Cela peut permettre de gérer l'hétérogénéité.
Le croisement d'informations provenant de documents de nature diffĂ©rente (cf le travail sur le dĂ©sert du Sahara : carte des densitĂ©s de population, diagramme climatique, photos de paysage, textes explicatifs, croquis paysagerâŠ). GE se prĂȘte bien Ă lâouverture sur dâautres sources documentaires puisqu'on peut intĂ©grer dans les repĂšres et avec le questionnement une photo, un tableau de statistiques, une carte, un lien hypertexte vers une page dâun site, un calque qui se superpose Ă l'image du globe. Tout cela sur un seul et mĂȘme support.
Tout un corpus documentaire dans la mĂȘme fenĂȘtre sans ĂȘtre obligĂ© de jongler avec des pop-up, des ascenseurs, des logiciels multiples. Cela facilite le travail de lâĂ©lĂšve.
Une carte, une image au sol viennent compléter la lecture de l'image-satellite, ici à FÚs
Depuis la version 5, il est en outre possible de "remonter le temps" et de superposer-comparer des images satellites Ă diffĂ©rentes pĂ©riodes (croissance de las Vegas, disparition progressive de la mer dâAralâŠ). Les dates des prises de vue apparaissent de maniĂšre plus immĂ©diate quâavant.
Deux autres fonctionnalités, réservées jusque là à la version payante GE Plus, sont désormais disponibles :
- importer des données GPS (pour une sortie scolaire par exemple)
- enregistrer une visite virtuelle dans GE et commentaire audio possible.
Enfin, le langage html est presque entiĂšrement reconnu et utilisable dans les info-bulles. Ce ne sont plus seulement des liens hypertextes, des images ou des vidĂ©os qui peuvent ĂȘtre intĂ©grĂ©s, mais aussi des pages entiĂšres d'un site (Ă utiliser avec modĂ©ration !), des calques animĂ©s, des animations Flash, des zones mappĂ©es cliquables, un QCM... GE devient un gĂ©o-navigateur Ă part (presque) entiĂšre !
IntĂ©gration dâune animation Flash sur lâextension urbaine au Caire
Enfin, autre avantage de GE et non des moindres, tous ces parcours sont adaptables au niveau de la classe ou de l'élÚve en décochant ou en supprimant certains repÚres sans altérer le document construit. Cela peut aider le professeur à gérer l'hétérogénéité de la classe.
Quelques apports de lâutilisation de Google Earth en Histoire
Si la plateforme logicielle est prioritairement dĂ©diĂ©e Ă lâĂ©tude gĂ©ographique, il nâest pas impossible dâen dĂ©tourner lâusage vers lâHistoire.
Dans quelles démarches utiliser Google Earth en Histoire ?
DĂ©couvrir des lieux
La fonction la plus simple consiste à montrer les traces du passé et faire découvrir des lieux : par exemple survoler le chùteau de Chambord, le palais du Louvre, une cathédrale gothique, le pont du Gard ou tout autre bùtiment en 3D apporte une autre perspective que la simple photo du manuel.
Les reconstitutions en 3D des villes de Venise, Paris, Munich, Amsterdam⊠offrent de ce point de vue une richesse inégalable.
Au delĂ de la simple visite de lieux, on peut aussi partir Ă la dĂ©couverte dâune civilisation ancienne (AthĂšnes, RomeâŠ) ou lâEgypte ancienne, en survolant les Pyramides ou la VallĂ©e des Rois : on peut aussi profiter de la possibilitĂ© quâoffre GE de crĂ©er des couches pour expliquer un phĂ©nomĂšne tel la crue du Nil en superposant les reconstitutions de la crue Ă lâimage satellite. En jouant avec le curseur sur la transparence des couches, les dessins sâaniment en complĂ©tant lâimage-satellite et la crue se dĂ©roule sous les yeux des Ă©lĂšves qui peuvent renouveler lâexpĂ©rience autant de fois quâils le souhaitent.
Toujours en Egypte, entrer et circuler dans le tombeau en 3D de Toutankhamon (fichier fourni par des utilisateurs de GE) introduit aux rites funĂ©raires Ă©gyptiens mieux quâun simple texte.
Replacer lâĂ©vĂ©nement dans son cadre spatial
Mais il est possible aussi dâaller plus loin et d'utiliser Google Earth avec un scĂ©nario qui permet d'ancrer le rĂ©cit historique dans une rĂ©alitĂ© gĂ©ographique, de donner Ă voir un Ă©vĂ©nement dans son contexte gĂ©olocalisĂ©.
On peut ainsi replacer lâĂ©vĂ©nement dans son cadre spatial, que ce soit lâannĂ©e 1789 entre Versailles et Paris sur les lieux de la RĂ©volution ou les Ă©vĂ©nements de mai 1968, gĂ©olocalisĂ©s avec prĂ©cision pour des Ă©lĂšves qui nâont quâune connaissance trĂšs lointaine de ce que peuvent ĂȘtre Nanterre, CharlĂ©ty, la Sorbonne ou lâOdĂ©on ! La dĂ©marche est la mĂȘme pour Le voyage d'Ibn Battuta qui permet, en une quinzaine d'Ă©tapes, de dĂ©couvrir la civilisation de l'empire du Mali au XIV° siĂšcle et les grands courants d'Ă©changes Ă travers le Sahara et le Sahel.
Utiliser des cartes anciennes géolocalisées
Google Earth offre au professeur dâHistoire, une forte plus-value avec les cartes de David Rumsey : plus de 200 cartes numĂ©risĂ©es et implĂ©mentĂ©es avec prĂ©cision sur le globe virtuel.
Les transformations urbaines de Paris sous NapolĂ©on III prennent davantage sens lorsquâon superpose les percĂ©es haussmanniennes Ă une carte numĂ©risĂ©e et gĂ©olocalisĂ©e de 1834 (collection Rumsey) sur laquelle apparaissent de maniĂšre trĂšs dĂ©taillĂ©e tous les Ăźlots urbains vouĂ©s Ă la dĂ©molition.
GrĂące au curseur de transparence qui autorise la superposition de deux cartes de dates diffĂ©rentes, ou encore par lâutilisation de la fonction "animation temporelle" que lâon retrouve dans certains fichiers, Google Earth rend possible â comme en gĂ©ographie - la visualisation dâune Ă©volution spatiale et temporelle, ainsi sur le mĂȘme sujet lâannexion des villages limitrophes de Paris en 1859.
Cinq de ces cartes ont Ă©tĂ© utilisĂ©es pour le dossier sur La Traite transatlantique et le commerce triangulaire : lâajout de documents connexes (tĂ©moignage dâesclave, video sur la mĂ©moire dâun port nĂ©grier, images de captifs, de navires, localisation des forts europĂ©ens de la traite sur la cĂŽte africaine, graphique des productionsâŠ) permet de proposer ainsi un vĂ©ritable dossier multimedia et facilite le croisement des informations. Disposer dâun support unique pour ce travail rĂ©duit aussi le risque de dispersion de lâĂ©lĂšve.
Il est aussi possible de numĂ©riser sa propre carte papier et de lâinsĂ©rer dans GE : les plans des villes mĂ©diĂ©vales de Bourges et LĂŒbeck ont Ă©tĂ© ainsi utilisĂ©s pour traiter le thĂšme "SociĂ©tĂ©s et cultures urbaines du XIĂšme au XIIIĂšme siĂšcles" du nouveau programme de Seconde. Lâenseignant prĂ©sente ainsi une approche spatiale des donnĂ©es, des lieux, montre les permanences dans un espace dĂ©limitĂ©.
IntĂ©grer les outils numĂ©riques de GE , superposer plan et maquette 3D permet donc de crĂ©er des interrelations entre documents variĂ©s. La mise en perspective dâune Ă©tude de cas est facilitĂ©e par un lien hypertexte, une photo, une carteâŠsurtout depuis la version 5.2 et lâouverture, directement dans GE, dâune fenĂȘtre de son navigateur.
On peut ainsi construire un vĂ©ritable corpus documentaire dans lequel la navigation est aisĂ©e entre les couches dâinformations sĂ©lectionnĂ©es par le professeur et un questionnement adaptĂ© au niveau de la classe.
Si lâon souhaite peaufiner la mise en page, il nâest, alors, pas inutile de maĂźtriser un logiciel de dessin, de photographie, Ă©ventuellement, un Ă©diteur html.
Des jeux avec Google earth ?
Depuis deux ans, une partie du site est consacrĂ©e Ă des jeux rĂ©alisĂ©s avec Google Earth. Du divertissement sur un logiciel de gĂ©olocalisation ? Pourquoi pas ! Les « jeux sĂ©rieux » se multiplient et prennent leur envol dans le domaine de lâĂ©ducation.
En liaison donc avec le dĂ©veloppement de lâhistoire des Arts en collĂšge aussi bien quâen lycĂ©e, jâai dĂ©veloppĂ© des jeux gĂ©olocalisĂ©s. Deux approches ont Ă©tĂ© privilĂ©giĂ©es : le jeu de piste et le quiz.
Ă partir dâun scĂ©nario (exemple : la disparition de la Joconde ou le vol dâĆuvres dâart), le joueur doit suivre un itinĂ©raire qui le conduit dans diffĂ©rents lieux, dont certains sont accessibles en 3D.
Le dernier jeu en date, MĂ©troPolâArt (janvier 2011) propose une vingtaine dâĂ©tapes dans le mĂ©tro parisien et diffĂ©rents monuments liĂ©s au monde de l'art. Ăvidemment, le trajet nâest pas donnĂ© d'emblĂ©e, le joueur doit trouver son chemin Ă partir dâindices fournis par textes, photos ou vidĂ©os.
Une dĂ©couverte de diffĂ©rents domaines artistiques (peinture, architecture, BD, chanson, opĂ©raâŠ) qui peut servir d'introduction ludique Ă l'histoire des Arts.
Ces jeux permettent d'exercer son sens de lâobservation et de la dĂ©duction ainsi que sa capacitĂ© de navigation Ă diffĂ©rentes Ă©chelles sur la plateforme logicielle. Tout au long du parcours, le joueur a la possibilitĂ© de noter le rĂ©sultat de ses recherches dans un rapport d'enquĂȘte. Le tout a bien sĂ»r un intĂ©rĂȘt ludique, mais peut parfaitement ĂȘtre utilisĂ© comme support dâune sĂ©quence d'enseignement. (en attendant la parution en mai-juin 2011 dâun article sur Google Earth en Histoire des Arts, dans la revue des Cahiers PĂ©dagogiques, voir lâarticle sur le site.) Cet article s'appuie sur l'exemple de "la Joconde a disparu", deux analyses dâĆuvres de la Renaissance, et donne quelques autres pistes de dĂ©couverte et de travail en utilisant les maquettes en 3D de SketchUp ainsi que les ressources de la galerie et du site consacrĂ© Ă l'Ă©ducation de Google Earth. Sur ce sujet, on pourra aussi se reporter avec profit Ă lâarticle de JĂ©rĂŽme Staub dans la Lettre dâinformation gĂ©omatique n°2.
Les quiz (deux pour le moment : Tintin, tĂ©moin du XX° siĂšcle qui permet de retrouver le contexte gĂ©opolitique des albums dâHergĂ© et A la dĂ©couverte des chĂąteaux de la Loire), sont eux aussi gĂ©olocalisĂ©s ; ils mĂȘlent histoire, gĂ©ographie, BD et compĂ©tences numĂ©riques et permettent de mener une exploration ludique.
Conclusion
Sans nĂ©gliger les Ă©cueils de GE : erreurs de localisation, publicitĂ© rĂ©cente en mode "Recherche", zones vierges ou quasi-illisibles car de trop faible rĂ©solution, qui permettront au professeur de faire une lecture critique et aux Ă©lĂšves de ne pas confondre carte, image satellite, image aĂ©rienne, vue paysagĂšre ! la plate-forme logicielle reste un outil assez simple Ă utiliser, qui plaĂźt aux Ă©lĂšves, qui met Ă disposition des contenus numĂ©riques variĂ©s pour des pratiques de classe actives et qui permet Ă la fois une autre lecture de l'espace gĂ©ographique et la crĂ©ation dâun rĂ©cit historique. Mais la seule lecture et le seul visionnement des sĂ©quences (au videoprojecteur par exemple) ne me paraissent pas suffisants. De vĂ©ritables activitĂ©s doivent ĂȘtre organisĂ©es par les enseignants avec leurs Ă©lĂšves. Câest ce que jâai essayĂ© de faire avec ce site : ouvrir des perspectives, et dĂ©fricher dâautres usages possibles du gĂ©onavigateur.
Jean-Marc Kiener, Annecy, avril 2011